Bolivie : Petite histoire informelle du Sud

La légende raconte que l’indien Huallpa, en 1545, découvrit de l’argent sur la montagne Sumaj Orcko. Les espagnols l’apprennent et l’histoire s’emballe. Potosi s’invente une nouvelle histoire. Sumaj Orcko (  » la plus belle montagne  » en Quechua ) devient la Cerro Rico (  » la montagne riche  » en espagnol… ). Et ce sont des tonnes d’argent transformées en pièces de monnaie, frappées à Potosi à 4000 mètres d’altitudes, qui vont inonder l’espagne. Par le biais du commerce européen, ce sont toutes les économies, hollandaise, française, britannique qui en profitent.

A Potosi, les indiens vivent et meurent dans la mine pour satisfaire l’appétit colonial. La plus belle montagne devient un enfer. La consommation de coca devient obligatoire car contrôlée par les espagnols et surtout parce que ces derniers se sont rendus compte qu’elle permettait aux indiens de rester plus longtemps sous terre. A force de mourir trop vite, la main d’oeuvre indienne sera épaulée par leurs camarades de misère africains.

Commerce triangulaire, début de la mondialisation, rien n’échappe à Potosi. Une ville coloniale aux beaux palais européens dans le centre, une ville minière qui aurait pu inspirée Zola en périphérie. 1825, Simon Bolivar libère la moitié du continent Sud Américain du joug espagnol. Le Haut Pérou devient la Bolivie en hommage au libérateur. Le filon du Cerro Rico est pratiquement épuisé. Reste une tradition ouvrière et contestataire qui fera de Potosi, avec La Paz, un haut foyer révolutionnaire, et de la Bolivie, le pays qui connaîtra le plus de révolutions au monde, 193 coups d’état sur une période de 157 ans.

1967, Ernesto Guevara, dit le  » Che « , auréolée de sa victoire cubaine avec Fidel Castro, rêve d’exporter la révolution sur tout le continent en démarrant le combat, évidemment, dans la région de Potosi. Le foyer de guérilla qu’il tente d’allumer, après 11 mois d’effort passé à parcourir les montagnes et à convaincre entre autres les mineurs de Potosi, se soldera par la mort de la légende, non loin de là, lors d’une embuscade tendue par l’armée régulière et orchestrée certainement par la Cia.

Clap de fin de l’histoire.

Cinquante ans plus tard, un dimanche sur la place de Potosi, les mineurs ont posé les bâtons de dynamite pour se rendre à l’Église puis au match de foot. La mondialisation continue sa route. Plus tard les mineurs reprendront le chemin de la mine, une boule de feuille de coca dans la bouche, la suie dans les poumons, en attendant la prochaine contestation, la prochaine révolution.

Ce même jour, deux voyageurs quittent Potosi et montent dans un car en partance pour Sucre. L’histoire continue…


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