
Il ne faut pas nécessairement arriver la nuit à Mostar par un autocar de Croatie, après avoir présenté son passeport de multiples fois grâce à un jeu alambiqué de passages de frontières aux alentours de Neum, tomber dans un lit inconnu puis se relever quelques heures plus tard aussi hagards qu’excités pour se rendre sur le plus célèbre pont de la ville. Mais c’est ainsi que nous nous sommes présentés ce matin dans la vieille cité Bosniaque.
La rencontre est de celles que seuls les voyages un peu cabossés et hasardeux peuvent inventer. Nous avions pourtant eu tout loisir de nous y préparer. On connaissait presque ce pont par cœur. Nous avions fait défiler sur nos écrans toutes les photos trouvées sur la toile, lu quelques histoires riches de vies et de guerres, d’élans et de chutes, de discordes autant que de concordes…nous n’avions à vrai dire presque plus besoin de nous y rendre puisque Mostar avait déjà visité nos rêves.
Et Mostar nous a pris dans ses bras.

C’est une vallée entourée de petites montagnes apres, rudes et polies par le temps. Une rivière au yeux de jade, aux eaux froides, du nom de Neretva trace en son sein un sillon d’opale. Sur les flancs des collines, des maisons aux toits de tuiles ou de lauzes sont ramassées autour de minarets de pierre pâles élancés vers un ciel azuréen sans défaut.



Et puis c’est un pont en dos-d’âne du 16ème siècle pourtant tout neuf puisque reconstruit à l’identique en 2004 suite aux bombardements sur la ville de 1993. Comme pour effacer les stigmates du malheur et faire taire les voix de la discorde, le pont de Mostar est devenu le symbole de la paix retrouvée. Quoi de mieux qu’un pont pour tendre la main vers l’autre ?

Mais pour être tout à fait honnête, si l’histoire de cette cité nous aura évidemment touché, nous devons avouer que l’intensité de cette rencontre fût essentiellement d’ordre émotionnel. Mostar est de ces endroits dans le monde qui, lorsqu’ils vous prennent dans les bras, font disparaître toute fatigue et insufflent une joie et une énergie débordantes. C’est ce qui est arrivé ce matin avant que le soleil accélère sa course.
Ce sentiment n’attend aucune explication intellectuelle. Nous étions encore une fois de plus, tombés amoureux d’un coin de cette drôle de planète au détour d’un pont en pierre. Les quatre pieds dans la rivière, nous n’eûmes qu’à goûter la joie d’être simplement là. Et ce fût un bien joli moment.

Le soir arrivant, nous avons ensuite continué notre route car c’est aussi à cela que sert parfois un pont, à avancer un peu plus loin avec des souvenirs lumineux et de la joie pleins les poches…
Haut les cœurs, le vieux pont de Mostar est encore et toujours debout !

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