
6h00, sur la terrasse de l’hôtel au second étage, le soleil laisse un dernier répit à la fraicheur de la nuit passée. Il fait encore sombre. Sur les montagnes, sur la rivière, l’aurore n’est encore qu’une promesse.
On ouvre les yeux, selon des rites bien installés. Le café succède au thé qui lui-même succédera au prochain café… Ananas, papaye, fruit jacquier, pastèque ponctuent chaque gorgée tiède avalée en silence.
Apparition furtive d’un moine en sandale parti en quête de sa pitance quotidienne. Il y a le chant du coq et le bruit naissant d’une cité toute entière qui décide de s’éveiller.
Nous vivons au coeur d’un village, perdu au coeur de la ville. En contrebas, un homme baille en arrosant son jardin peuplé de bananiers. Derrière, dans la cour d’une autre maison, un coq tente de faire régner sa loi sur son royaume. Plus haut, en face, sur une autre terrasse, une jeune femme étend son linge. Il sera sec dans une heure.Au fond, bien plus loin, on distingue au travers de la grille d’un jardin, le reste de la ville, les automobiles, les tuks tuks et consorts…
9h00, le jeune garçon qui nous héberge, nous emmène sur son scooter jusqu’à une ruelle pour y laver notre linge. Une maison en bois sombre et dans l’encadrement, une femme au visage pâle, aux lèvres rouges, s’affaire devant une table à repasser. On l’écoute discuter des modalités avec notre logeur. Quelques phrases thaï mélodieuses entre nos deux nouveaux amis, des sourires, inclinaison polie de la tête, mains jointes devant le visage et nous comprenons que le sort de notre linge est scellé.
Nous le retrouverons le soir au même endroit, propre, plié, repassé, le parfum frais du savon en sus.Sourires, inclinaison polie de la tête, mains jointes devant le visage.
11h00, un bus rafistolé nous dépose sur le bord de la route au milieu de nulle part. Nous nous enfonçons dans la forêt. Les bambous, le chant des insectes, une chaleur pesante. Un peu plus loin se niche un centre de soin pour éléphants abîmés par la vie et le labeur. Nous les surprenons au moment privilégié du bain. Mahouts et pachydermes se rafraichissent dans une petite mare. Les éléphants disparaissent entièrement sous l’eau pour ressurgir à la surface quelques secondes plus tard, la trompe tendue vers le ciel. Puis ils aspergeront leurs maitres en les douchant avec leur appendice. C’est spectaculaire et réjouissant.

16h00, retour à l’endroit où le bus nous avait déposé le matin. Nous sommes à environ trente kilomètres de Lampang sans savoir encore précisément comment rebrousser chemin. Notre seul plan est d’attendre qu’un car passe et lui faire signe…maigre plan… La chaleur semble décuplée avec le bitume et l’ombre disponible est trop loin de la chaussée. Nous risquons de louper un potentiel bus. On reste donc sur le bord à scruter la route. On fond lentement.

Nous avons aussi lu que le stop ne fonctionnait pas dans le pays…alors on décide de faire du stop…
Un quart d’heure plus tard, nous sommes confortablement installés dans la cabine d’un camion climatisé. Notre nouvelle rencontre éphémère va sur Bangkok et propose de parcourir les 600 kms en sa compagnie. Nous lui indiquons que nous voulons aller seulement à Lampang. Il ne comprend pas. Il ne lit pas notre alphabet, nous ne lisons pas le sien.
Quant à l’oral, il nous faudra décliner tout notre palette d’intonations :
» Lampang ? » Non, pas celui-là.
» Lampang ? » Non, pas celui-ci.
» Lampang ? » Toujours pas……
Pour qu’enfin son visage s’éclaire et qu’il s’exclame radieux : « Ah, Lampang ! »On le tient coco ! Tous les trois déclamons à l’unisson : » Lampang ! Lampang ! Lampang ! »…
Lui, le routier qui conduit le camion dans lequel nous sommes désormais assis, est devenu notre nouvel ami.17h00, tour de l’horloge, sur la place de Lampang.
C’est vrai que le stop ne fonctionne pas…
C’est juste un ami qui nous a reconnu et qui s’est arrêté…19h00, dans les halles du marché, on récolte quelques fruits pour le lendemain matin. On en profite pour y goûter des plats intriguants qui piquent notre curiosité.
22h00, dans la chambre, nous pensons à cette journée ordinaire, peuplée de rencontres éphémères qui l’ont rendue extraordinaire.
Demain, nous partons pour Phrae à la frontière du Laos. Nous avons prévu d’y passer une journée ordinaire…
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